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Bericht des Marchese d’Adda uber seine Unterredung mit dem französischen Außenminister Delcaasé

In document SLÆGTSFORSKERNES BIBLIOTEK (Sider 163-166)

TEIL I Dokumente Nr. 1-38

5. Bericht des Marchese d’Adda uber seine Unterredung mit dem französischen Außenminister Delcaasé

(Abschrift)

[Januar 1915]

Pourparlers préparatoires en vue d’une Paix éventuelle Arrivé à Paris, ma première préoccupation a été d’être présenté — et sous une bonne lumière — à M. Delcassé.

Celui-ci avait été ministre de la Marine et connaissait mon nom, autant plus que j’avais été mêlé dans une polémique de presse franco-italienne à l’époque de Fachoda — en 1899 — et Delcassé alors ministre des Affaires étran­

gères m’avait fait appeler au Ministère du Quai d’Orsay par M. Lockroy, alors ministre de la Marine, pour me remercier de mon esprit conciliant.

Mon ami le Vicomte d’Humières, chef du Bureau Chiffres au Quai d’Orsay, a mis au courant M. Piccioni, chef du Cabinet de M. Delcassé, du but de mon voyage à Paris. M. Piccioni s’est trouvé à déjeuner avec moi chez le Vicomte d’Humières; je lui ai expliqué le caractère exacte de ma mission. M. Piccioni approuva et apprécia les sentiments de bonne volonté qui manifestent mes amis d’Allemagne et il m’a assuré que très prochainement M. Delcassé m’aurait reçu.

En effet, une semaine après — le 5 janvier — M. d’Humières me téléphona d’aller déjeuner chez lui parcequ’il avait quelque chose à me dire. C’était, que le soir à 10 h. M. Delcassé m’aurait reçu dans son cabinet.

M. Delcassé, très aimable, mais grave et l’air préoccupé, me demanda: —

”Cher Monsieur, comme vous le comprendrez, ce ne sont pas les moments de faire des paroles inutiles; voulez-vous bien me dire quel est le but exacte de votre voyage à Paris?” —

J’ai répondu:

— ”Monsieur le Ministre, je dois vous avouer tout d’abord que je n’ai aucune mission ni officielle ni officieuse. Voici la vérité pure et simple: je me trou­

vais en Allemagne et comme technicien et constructeur naval j’ai voulu voir Kiel et son arsenal; le Prince Henri de Prusse a bien voulu m’inviter déjeuner et j’ai été frappé des déclarations confidentielles qu’il m’a fai [tes] à propos de l’origine de la guerre. Ces paroles me confirmaient plus que jamais dans la persuasion que l’Allemagne n’a jamais voulu la guerre et qu’elle l’a subie comme une fatalité. Si l’Allemagne ne songeait, ne rêvait que la guerre, pour­

quoi n’a-t-elle pas fait la guerre à la France dans les 2 moments les plus favo­

rables? En 1904 à l’époque de la guerre russo-japonaise, quand l’Angleterre alliée du Japon ne pouvait pas s’allier à la France. Et en 1912 à l’époque de la saisie du Manouba et du Carthage, quand l’Italie, sur le conseil de l’Alle­

magne, se montra très conciliante dans la solution de cette grave affaire qui avait soulevé dans toute l’Italie une vive indignation contre la France, surtout pour le discours de M. Poincaré. A ce moment-là - si l’Allemagne avait voulu,

— l’Italie aurait déclaré la guerre à la France.

Retourné à Berlin et dans l’attente d’obtenir une permission de me rendre au front comme écrivain militaire, j’ai eu occasion de m’entretenir avec de mes amis d’Allemagne et d’approcher des personnalités éminentes de la politique et de l’industrie. Convaincu par des conversations spontanées et quotidiennes, qu’aucune rancune existe dans l’esprit allemand contre la France et que la guerre entre ces deux grandes nations peut bien être considérée comme insen­

sée, parceque elle n’a pas été déchaînée par la haine, j’ai demandé à mes amis d’Allemagne: ”mais pourquoi ne faites-vous pas des démarches très discrètes et presque personnelles, pour savoir si on pourrait trouver un terrain d’entente sur lequel on pourrait diriger plus tard les pourparlers préliminaires pour une paix éventuelle? M. Poincaré a dit tout récemment ”que la France voulait une paix avec dignité.” C’est une définition pleine de tact et de modération et qui engage l’Allemagne à démontrer la même modération. Pourquoi, vous Alle­

mands, ne feriez-vous pas les premières avances pour montrer aux Français que vous êtes animés, vous aussi, de sentiments de conciliation?”

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Mes paroles ont eu un accueil qui dépassait mes espérances, car le ter­

rain était favorable. J’ai longtemps parlé avec mes amis d’Allemagne à ce sujet; ils m’ont dit: ”Vous êtes Italien c’est-à-dire appartenant à un Etat neu­

tral. Vous avez des amis en France comme vous en avez en Allemagne. Voulez- vous aller à Paris dans le but de voir tous les hommes de bonne volonté, qui connaissent bien la situation politique et militaire de l’Europe et en particulier celle des puissances belligérantes, les hommes qui dirigent directement ou in­

directement les affaires de la République, et leur demander leur opinion sur des éventuels pourparlers pour la paix?”

Voilà, Monsieur le Ministre, comment je suis arrivé à Paris; je suis ami de la France ainsi que de l’Allemagne — comme presque tous les Italiens d’ail­

leurs. — L’Italie désire que dans cette guerre ni la France ni l’Allemagne aient à sortir avec trop de blessures. La haine anglaise contre l’Allemagne ne trouve aucune approbation en Italie . . Nous ne pouvons pas comprendre en Italie ces haines politiques et économiques de l’Angleterre. Dans un siècle l’Angleterre a nourri trois haines: Napoléon, la Russie, i’Allemagne.

Comme elle ne possède qu’une puissance navale, elle cherche toujours des alliés du continent qui mettent à sa disposition les armées de terre nécessaires à ses rancunes. En définitive ce sont toujours les alliés du continent qui payent le plus. Arrive aujourd’hui ce qui est arrivé en Grimée. Seulement qu’aujourd^

hui les Russes sont alliés aux Anglais. Un nonsens; nous autres Italiens, qui possédons par nature le sens politique, nous sommes persuadés, par exemple, qu’une alliance entre l’Allemagne et la Russie n’est qu’une question de quelques années.

Et avec cela j’ai tout dit; je vous répète, Monsieur le Ministre, que je ne suis investi d’aucun pouvoir officiel ou officieux; mais mes amis ont des liens avec les hommes qui gouvernent l’Allemagne. Voulez-vous bien me dire, Mon­

sieur le Ministre, si mon voyage et mes humbles efforts sont destinés à rester inutiles?”

M. Delcassé, l’air moins soucieux, me déclara tout simplement: ”Ecoutez, mon cher marquis; comme ministre et étant données mes responsabilités officielles, je ne puis pas vous répondre si votre voyage et vos efforts dont j’apprécie le noble but, seront inutiles ou non. Je puis vous dire une chose seulement: avant que le gouvernement français puisse accepter l’idée de n’im­

porte quels pourparlers, il faut que l’Allemagne nous fasse connaître quelles sont ses idées sur l’avenir et la destinée de la Belgique. Voilà le point redou­

table de la paix future; tout le reste passe en deuxième ligne. La destinée de la Belgique est le lien qui nous serre à l’Angleterre et pour l’Angleterre la liberté de la Belgique est tout. Si vous retournerez ici, veuillez me communiquer ce

que pensent vos amis d’Allemagne à ce sujet, sans cela toute autre conversation sur les conditions de paix etc. serait du temps perdu.”

Après quelques paroles échangées avec le ministre sur différentes que­

stions d’ordre secondaire, c. à d. sur l’admirable préparation militaire de l’Allemagne, sur l’élévation de l’esprit publique, sur la puissance de ses réserves en hommes, en argent, en vivres (Delcassé m’interrompait toujours, en disant:

oui, oui, je sais, j’en suis convaincu de tout cela . . . ) j’ai pris congé.

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